ALICE PIERRE,

« Ce que j’aime dans l’écriture féminine, c’est l’humour dont sont capables les femmes. »

La première chose que l’on remarque chez Alice Pierre, c’est ce regard qui interpelle. Une femme comme on les aime, franche, généreuse, intelligente et audacieuse. La directrice de la Maison du livre a toujours aimé la littérature et l’univers fascinant qui pouvait s’y référer. Après ses études, c’est tout naturellement qu’elle a souhaité travailler dans le monde de la culture. Elle a toujours soutenu les artistes, après plusieurs années à la province Sud, puis au Studio 56 de Dumbéa, c’est donc à un autre challenge qu’elle a décidé de se confronter depuis un peu plus d’un an.


Vous dirigez aujourd’hui la Maison du livre, quelles sont les missions qui vous attendent dans les prochains mois ?
La Maison du livre existe depuis 12 ans, nous sommes actuellement hébergés dans le bâtiment Eiffel de la Bibliothèque Bernheim et nous cherchons un nouveau lieu, car la bibliothèque va entrer dans une phase de rénovation.
Nous travaillons sur plusieurs axes, les créations, les résidences d’écritures en province Nord et Sud, nous avons également un volet diffusion, avec le camion librairie qui sillonne les routes, mais aussi un volet promotion en local de la littérature dans les établissements scolaires et bien entendu le SILO qui se tiendra du 30 septembre au 2 octobre.
Nous pouvons aussi parler du fait que nous sommes un centre de ressources, de conseils et d’accueil pour les porteurs de projets d’écriture ou d’édition. Bien entendu, nous essayons de promouvoir le livre calédonien à l’échelle régionale et nationale.

Quelles sont les femmes auteures qui vous touchent et comment voyez-vous l’évolution de la littérature féminine ?
J’avoue avoir un faible pour les essais et dans ce domaine mon grand choc, c’est Mona Chollet qui est aussi journaliste. C’est peut-être pour cela que je l’aime particulièrement, car tout est extrêmement bien documenté. Elle réinvente le couple, j’ai l’impression d’entendre ce que je pense profondément dans Sorcières : La puissance invaincue des femmes. C’est une écriture factuelle et pas militante et ça me plaît énormément.
J’aime aussi Monique Grande ou Virginie Despentes avec King Kong théorie qui a été pour moi comme un uppercut. Je m’interroge en ce moment sur le fil ténu du consentement par exemple et ces femmes m’aident à mieux l’appréhender. J’ai également une admiration toute particulière pour Déwé Gorodé pour son implication dans la vie locale, pour ses textes percutants. Elle nous a montré un chemin, elle a incarné quelque chose de précieux. À la fois femme militante, engagée en politique et aussi écrivaine, à cette époque-là c’était incroyable quand on y pense.

Quelle est l’auteure calédonienne que vous voudriez voir mise en valeur ?
TOUTES ! Ce que j’aime dans l’écriture féminine, c’est l’humour dont elles sont capables et en ça, Frédérique Viole avec les nouvelles Narafala ou l’ouvrage jeunesse La Princesse au petit prout me plonge dans un univers que j’apprécie beaucoup. J’ai également découvert Leslie Gobille avec Les Vestiges de l’Orée, et j’avoue m’être complètement reconnue dans ses personnages féminins qui ressemblent tant à mes amies que j’ai l’impression de les connaître.

Et vous dans tout ça ? Êtes-vous une femme engagée ?
Oui, je crois que je peux le dire, je viens d’obtenir mon diplôme de sophrologue et je voudrais pouvoir accompagner les femmes dans toutes ces douleurs trop peu reconnues et pour les aider aussi à se réapproprier leur corps après une maternité par exemple. Quand je vois ce qui se passe aux États-Unis en ce moment*, je me dis que rien n’est jamais acquis.
Je suis également, avec mon amie Olivia-Manissa Panatte, à l’origine de la création d’une association que nous avons appelée Mathiila et qui souhaite aider les femmes à redonner de la place au corps, à l’assumer par la danse intuitive par exemple. L’idée n’est pas d’exclure les hommes mais d’avoir des temps pour vivre son corps en liberté, sans avoir de dictats, pouvoir se reposer entre femmes dans un moment de sororité.

  • La Cour suprême doit statuer sur un projet d’arrêt visant à laisser libre choix à chaque état d’autoriser ou non l’avortement, ce qui supprimerait la jurisprudence Roe v. Wade de 1973 qui protège le droit des Américaines à interrompre leur grossesse dans tout le pays.

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