Clitoris, rendez-vous en terre inconnue

Ce n’est pas un coquillage. Ce n’est pas une fleur. Encore moins un fruit, même si c’est comme cela que l’on représente la plupart du temps le sexe féminin. Et que dire du clitoris ? Petit, mais puissant, ce serait le seul organe du corps ayant pour seule fonction
la jouissance.
« Dites-le aux hommes »,
nous direz-vous. Sauf que,
le Haut Conseil à l’égalité montre qu’un quart des filles de 15 ans… ignorent
encore qu’il existe !
Par C. Idoux

« Dans la société occidentale,
le clitoris, on l’a excisé dans notre tête »,Pierre Foldès, chirurgien de la réparation
des mutilations génitales.

À la décharge de ces jeunes filles, on peut dire que le clitoris a longtemps été oublié, caché, tout comme le plaisir féminin. À quelques exceptions près comme la maison d’édition Magnard, ne cherchez pas le clitoris dans les manuels scolaires !
Cet organe purement féminin est aujourd’hui au centre des réflexions de nombreuses militantes féministes qui planchent sur des initiatives valorisant l’appareil génital et le plaisir féminin. Ce qui relance l’intérêt des médias et des femmes autour du clitoris ? Une campagne de street art féministe placardée dans tout Paris le 8 mars dernier, à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes. « It’s not a bretzel » a été motivée par Julia Pietri* qui rappelle dans les colonnes du quotidien français Libération que cette campagne doit « inonder les rues de clitoris pour sensibiliser à l’éducation sexuelle ». Depuis, elle a été reprise dans plusieurs villes de France et pays en Europe.

Le boom du clito

Ce coup de projecteur sur notre organe du plaisir n’est en réalité pas nouveau. Car depuis quelques mois, les initiatives liées au plaisir féminin ont explosé. D’abord avec des sites ultra didactiques pour atteindre l’orgasme comme OMGyes, ou encore le fameux Pussypedia (le « Wikipédia de la chatte » comme l’appellent ses fondatrices) ou encore le compte Instagram « T’as joui ? » qui recueille des témoignages. Rien que ça.
Aujourd’hui, le boom du clito va plus loin avec la web-série « Clit Révolution » (voir p. 26) et le jeu interactif au nom plus qu’explicite pour connaître son clitoris, Clit-moi. En Belgique, on a décidé de créer une Journée internationale du clitoris (le 22 mai).
Le clitoris est devenu ces derniers mois un véritable objet de campagne politique et le symbole de l’égalité hommes-femmes, car l’excision, l’ablation du clitoris, existe elle depuis des millénaires et sert encore aujourd’hui d’arme contre les femmes (voir ALLER PLUS LOIN, p. 30).
Et puis avouons-le. Cette étape du féminisme après le mouvement #MeToo est plus joyeuse. Coucou les filles, le clitoris n’est pas réservé aux mecs, mais bien à vous ! C’est le moment de vous réapproprier votre sexualité, sans culpabiliser et de façon un peu plus décomplexée.

 

Mais qui es-tu ?

Mais à quoi ressemble exactement le clitoris ? « À l’os du poulet avec lequel on joue à savoir qui aura droit à un vœu ! » rigole Matilde, 13 ans. « Grand Dieu, je n’en ai aucune idée. Ce n’est pas des choses dont on parlait à l’époque et je crois que je suis un peu choquée » réagit Claude, sa grand-mère.
Pour Anne-Laure la maman, 45 ans, la réponse est lapidaire et ironique « On ne m’a jamais appris que j’avais un clitoris… Mais est-ce vraiment à moi de le savoir ? », sous-entendu, c’est à monsieur de se renseigner. Et bien, non. Non, Anne-Laure. C’est un peu comme la pâtisserie, voyez-vous. Quand on mange votre tarte aux pommes, c’est quand même intéressant pour la pâtissière d’en connaître les ingrédients pour qu’elle soit bonne pour TOUT LE MONDE !

12 000 récepteurs sensoriels…

Partant de cette base, un petit cours rapide d’anatomie. À l’extérieur, le clitoris est un organe d’à peine 6 à 8 mm de diamètre, mais il ne s’agit ici que de la partie « émergée ». Ce point, mystérieusement sensible, relègue au placard le mythique point G. Comme le pénis, le clitoris ressemble en surface à un gland recouvert d’un petit capuchon. À l’intérieur, le clitoris est en réalité un ensemble de « terminaisons nerveuses, de corps érectiles, de muscles et de ligaments »**. Et c’est là que vous ouvrez toutes de grands yeux ébahis ! Car en réalité, le clitoris mesure environ 11 cm et possède des bulbes en contact avec le vagin et l’urètre. Ainsi, si votre clitoris vibre, vous vibrez. Pas bête hein, la nature ? Sachez, mesdames, que le clitoris possède 4 000 récepteurs sensoriels de chaque côté… et 8 000 à son extrémité. Vous avez saisi tout à coup ? En réalité, 100 % des femmes sont clitoridiennes et l’orgasme vaginal n’EXISTE PAS, car c’est bien le clitoris qui entoure le vagin et les érections nocturnes existent aussi chez la femme. Et tout à coup, un monde de plaisir s’offre à vous !

Rendez-vous en terre inconnue

Alors pourquoi le quart des filles de 15 ans en France ne savent pas qu’elles possèdent un clitoris ? Pourquoi 83 % ignorent son unique fonction érogène ? En réalité, près d’une femme sur trois n’aurait jamais observé son intimité et 35 % d’entre elles n’auraient jamais vu leur clitoris, d’après le laboratoire Terpan, spécialisé en préservatifs féminin et masculin, auteur d’une étude qui corrobore les résultats de l’enquête du Haut Conseil à l’égalité sur la question.
L’étude, menée en 2017 auprès de 580 volontaires âgées de 17 à 58 ans, montre que les connaissances de l’anatomie féminine ne vont pas toujours de soi. Dans son étude de 2016, le Haut Conseil enfonce le clou : « Les jeunes, et en particulier les filles, méconnaissent leur corps, et le plaisir féminin reste tabou : 84 % des filles de 13 ans ne savent pas comment représenter leur sexe alors qu’elles sont 53 % à savoir représenter le sexe masculin, et une fille de 15 ans sur quatre ne sait pas qu’elle a un clitoris. »

Enjeu éducatif…

Si un rapport relatif à l’éducation à la sexualité a été réalisé par le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, c’est avant tout une question de volonté politique, et de loi. En effet, la loi du 4 juillet 2001 relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception prévoit qu’une « information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d’au moins trois séances annuelles et par groupes d’âge homogènes », et que ces séances « contribuent à l’apprentissage du respect dû au corps humain » (art. L312-16 du code de l’éducation).
Pour le Haut Conseil, quinze ans après l’obligation légale d’assurer l’éducation à la sexualité auprès des jeunes, le constat est unanime et partagé : l’application effective des obligations légales en matière d’éducation à la sexualité en milieu scolaire demeure encore parcellaire, inégale selon les territoires, car dépendante des bonnes volontés individuelles. À bonne « entendeuse »

… et social

Cette ignorance des jeunes hommes et femmes vis-à-vis du sexe féminin et en particulier du rôle — voire de l’existence — du clitoris dans le plaisir féminin « a des effets directs sur les jeunes filles (et sur les jeunes garçons) : difficultés pour appréhender son corps ou le corps de sa partenaire, difficultés pour se donner ou donner du plaisir, difficultés pour résoudre des problèmes de santé concernant les parties génitales, etc. », estime le Haut Conseil à l’égalité.
Dans leur ouvrage La Revanche du clitoris (2007), Damien Mascret, médecin sexologue, et Maïa Mazaurette, blogueuse spécialisée dans les questions de sexualité, vont plus loin. Ils parlent carrément d’une « excision culturelle du clitoris. […] En 2012, le clitoris ne figurait toujours pas dans le dictionnaire Larousse Junior des 7-11 ans alors que les testicules et le pénis y sont cités. »
Les différences de satisfaction et de plaisir sexuels (dont l’orgasme fait partie) entre femmes et hommes s’expliquent largement par le fait que l’on ne permet pas aux filles de connaître avec précision et exhaustivité leur sexe. La connaissance du sexe féminin, au même titre que le sexe masculin, et la reconnaissance du plaisir féminin et du rôle essentiel du clitoris, sont donc des étapes indispensables à la construction d’une sexualité positive et égalitaire. À vos miroirs de poche, les filles !

L’anatomie complète du clitoris
n’est connue que depuis une petite
douzaine d’années.

Pétition pour le clitoris dans les manuels

La campagne « It’s not a Bretzel » s’accompagne d’une pétition en ligne pour faire entrer le clitoris dans tous les manuels scolaires français.
 Que veulent les auteurs de la pétition ? « Dénoncer l’analphabétisme de la sexualité féminine en France et revendiquer le droit à l’égalité d’éducation sexuelle. 
Le clitoris est l’organe essentiel du plaisir sexuel des femmes, pourtant, il demeure un organe oublié des manuels scolaires. 
» La demande est claire : à Marlène Schiappa, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, ainsi qu’à Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale, que l’anatomie du clitoris soit fidèlement représentée, comme un organe faisant partie intégrante de l’appareil génital féminin, et ce dans tous les manuels scolaires de SVT.
 « Et nous leur demandons aussi d’inscrire la mention du clitoris dans les programmes scolaires de SVT, et d’accompagner cet enseignement d’une formation solide des enseignants » pour une éducation à la sexualité sans tabou ni censure.
Pour un enseignement du clitoris dans tous les manuels de SVT : https://www.change.org

 

The place to be

Ce n’est qu’en 1998 (oui, oui) qu’une équipe de chercheurs décrit vraiment ce qu’est un clitoris.
 Une tête, un coude, un tronc, une fourche, deux jambes, deux bulbes. Sa taille totale avoisine les 11 cm quand la taille moyenne d’un pénis en érection en France est de 13 cm.
Le clitoris ne procure pas que du plaisir. C’est aussi un excellent somnifère, antidépresseur et antistress. 
C’est gratuit, bio et éco responsable ! 
La première échographie pendant l’acte a été réalisée en 2008, il y a à peine 10 ans ! Il aura encore fallu attendre trois ans pour avoir sa première découpe en 3D. 
Ainsi, le trou de l’urètre est confiné dans ce qui compose un tout entre le clitoris et le vagin. C’est pourquoi on parle aujourd’hui davantage d’un organe clitoro-urétro-vaginal (CUV).
 Il y a une véritable interdépendance de tous ces organes entre eux. Lors de la pénétration, les sommets des corps caverneux s’entrechoquent, les bulbes clitoridiens sont compressés, et le clitoris double de volume. 
Au moment de l’orgasme, cela provoque des contractions réflexes périnéales. 
Lors de ces contractions, le gland clitoridien est poussé en avant et descend pour s’offrir au frottement. Tindiiiiiinn !

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