Enfants surdoués, précoces…Le business des diagnostics HPI

Entre la série télévisée avec la talentueuse comédienne Audrey Fleurot et les parents à la sortie de l’école qui nous bassinent avec le prétendu génie du petit dernier, on ne sait plus où donner de la tête.
En effet, on ne compte plus les blogs, ouvrages, émissions de télévision, presse spécialisée ou groupes Facebook dédiés aux HPI.


Mais quèsaco HPI ?

« Surdoué », « intellectuellement précoce », « haut potentiel intellectuel », pour ne citer que les termes les plus fréquemment utilisés, désignent le même profil de personnes. Aucun, en fait, n’est réellement adapté.
Pour la psychopédagogue Marie-Laure Billaud, un « surdoué » n’est pas plus doué que ses congénères, mais plutôt différemment doué. Un enfant « précoce » le sera toute sa vie, elle se demande donc si ce terme devra lui coller à la peau à tout jamais. Quant au « haut potentiel intellectuel (HPI) », il sous-tend des possibilités cognitives qui impliquent que nous n’avons pas d’autres choix que de nous en servir si nous en sommes dotés.

Définition

Une personne dite à « haut potentiel intellectuel » est quelqu’un présentant un fonctionnement intellectuel assez différent de ses contemporains. Cela sera notable en termes de raisonnement, de mémoire ou de vitesse de traitement d’une information. C’est principalement grâce à un test de QI que l’on pourra évaluer ces différences.
Il faut comprendre qu’à ce stade des recherches, on sait qu’une personne « HPI » a des caractéristiques qui lui sont propres et seules trois d’entre elles sont aujourd’hui scientifiquement avérées :

=>les jeunes enfants tiennent leur tête droite, acquièrent la marche et la parole avant les autres,
=>et/ou ils acquièrent le langage de façon précoce et structurée (avant deux ans),
=>et/ou ils ont une rapidité d’apprentissage et de compréhension supérieure aux autres individus (ceci tout au long de la vie).
C’est donc à l’aide d’un test de QI que l’on pourra évaluer si l’on est ou non « HPI ».

« Le « haut potentiel intellectuel »
concerne entre 2 et 3 % de la
population dans chaque classe d’âge,
tous milieux sociaux confondus.
« 

En France, on est considéré comme « haut potentiel intellectuel » lorsque le Quotient Intellectuel Total (QIT) est supérieur ou égal à 130. Ce test va permettre de révéler, entre autres, les qualités de mémorisation, d’abstraction et surtout de capacité de raisonnement.
C’est un outil essentiel pour mieux comprendre le fonctionnement cognitif, et s’agissant des personnes dites « HPI », leurs particularités dans ces domaines.
D’autres caractéristiques comme l’hypersensibilité, l’hypersensorialité, l’humour caustique ou l’intolérance à l’injustice sont souvent présentes, mais pas davantage que dans le reste de la population. Les êtres à haut potentiel intellectuel, notamment les enfants, ayant un meilleur accès au langage, peuvent, de fait, plus facilement verbaliser leurs ressentis, ce qui les rend plus visibles aux yeux des autres. Pour autant, ces signes ne sont pas à négliger, la présence de plusieurs de ces spécificités peut constituer un faisceau d’indices pouvant amener à un questionnement puis, potentiellement, à un test par un psychologue maîtrisant le sujet.
Mais pour éviter que tout le monde ne s’emballe… rappelons que le « haut potentiel intellectuel » concerne entre 2 et 3 % de la population dans chaque classe d’âge, tous milieux sociaux confondus. Soit, presque rien…

Attention aux opportunistes

Depuis quelques années, les recherches ont beaucoup progressé et s’accompagnent d’une multitude d’ouvrages de vulgarisation sur le sujet, ou de partage d’informations en tout genre. Malheureusement, elles ont aussi généré leur lot d’opportunistes.
Pour répondre aux nombreux besoins des familles concernées qui sont en recherche d’informations, d’accompagnements scolaires et/ou psychologiques, des praticiens libéraux, palliant les manques du secteur public, ont créé leur activité. Parmi eux se trouve également une grande part de petits malins attirés par une clientèle en quête de réponses.
Mais on ne s’improvise pas spécialiste : un psychiatre est un médecin ayant fait dix années d’études et un psychologue a appris son métier pendant cinq ans. 
Méfiance, donc, avec certaines enseignes aux tarifs plus ou moins sympathiques, aux amateurs éclairés et autres spécialistes autoproclamés.
En effet, depuis quelques années, c’est un véritable boom. Il semble que la tendance soit notamment née avec le livre de Jeanne Siaud-Facchin, Trop intelligent pour être heureux ? vendu à plus de 240 000 exemplaires.
70 groupes Facebook parlent du sujet et comptent 9 000 membres. Sachant qu’un test QI peut coûter entre 200 et 600 euros en métropole, il y a fort à parier que certains ont senti le filon… Sur le Net, ce sont les coachs spécialisés, sans diplômes, qui fleurissent pour vous faire passer des test de « détection de douance »… On aura tout vu !
Certains psychanalystes autoproclamés ont même des chaînes YouTube comptant pas moins de 22 000 abonnés, délirant ! Un véritable business a donc vu le jour, à vous de faire la part des choses et d’aller vers des personnes de confiance.

Alors, s’il y a bien une chose à retenir dans tout ça, c’est que si c’est avéré, comme le dit le pédopsychiatre du CHU de Lyon, Olivier Revol, « l’enfant à haut potentiel intellectuel n’est pas tout à fait un enfant comme les autres, mais comme les autres, c’est un enfant… ».

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