La charge mentale, on en (re)parle ?

On ne discute que de ça depuis quelques mois : la charge mentale imputée à la femme dans la direction des tâches dites ménagères. C’était la révélation de l’année. Qu’en est-il aujourd’hui ? A-t-on assisté à un tremblement de terre dans les conventions sociales ? Force 1 ou force 8 ? Belle revient sur le débat de 2017.

 

Le terme « Charge Mentale ménagère » apparait dans les années 1980 sous le stylo de Monique Haicault dans un article sur « La gestion ordinaire de la vie à deux ». Elle décrit la « double journée » de la femme, ses impératifs, ses contraintes et la fatigue qu’elle engendre. Mai 2017, la dessinatrice Emma s’empare du sujet et provoque un buzz énorme sur les réseaux sociaux. On ne parle plus que de ça désormais. À l’heure actuelle, le post dessiné a été liké plus de 76 000 fois et partagé presque 216 000 fois. Les commentaires sont surtout des remerciements : « Juste un mot… MERCI ! Vous avez mis en mots et en images ce que j’essaie, sans succès, d’expliquer à mon conjoint depuis des mois. C’est cette charge invisible qui me pèse. » Les femmes se reconnaissent et pour cause : la charge mentale n’est pas une invention. Qui n’a jamais pleuré en regardant sa « to do list » ? Qui n’a jamais ragé en entendant une réflexion mal venu de chéri sur le repas du soir ? « OUI, on mange des pâtes parce que j’ai emmené Kevin chez le docteur, que dans la salle d’attente, j’ai du corriger en urgence le dossier UV7845, tout en googlant une recette pour le gâteau de Brenda ».

Les femmes vont pouvoir enfin se (re)poser ?

Maintenant que le monde des médias et des réseaux sociaux ont adoubé le concept, peut-être que les hommes vont se réveiller et prendre leur part de responsabilité dans l’intendance de la maison. (rires)

Emma, elle-même, y croit puisqu’elle partage dans un article de BuzzFeed News : « J’ai fait cette BD dans l’espoir que les hommes la lisent et prennent leurs responsabilités. Le sujet peut paraître anodin parce qu’il s’agit de ramasser du linge mais, en fait, c’est épuisant, et c’est politique. »

Mais pour cela, il faudrait que la société change l’éducation sexiste donnée dès la naissance de l’enfant et qui encourage le schéma de la maman qui fait tout avec papa pour exécutant seulement. Le premier sujet est bien sûr le congé paternité. En France, il est de onze jours. En Nouvelle-Calédonie, il est au bon vouloir de l’entreprise. « J’ai eu deux jours pour mon premier enfant. J’en avais eu trois pour mon mariage, hallucine Jean. J’ai pris un mois de congé pour aider ma femme avec notre fils. J’avais besoin moi aussi d’avoir quelques semaines pour comprendre ce qui nous arrivait. Et je peux vous dire que je n’imagine pas une seconde le faire tout seul comme la plupart des femmes. »

Changer la donne

Le congé paternité, un nouveau débat lancé d’ailleurs avec une pétition pour un rallongement des jours.

Les poupées, le rose, le mini-aspirateur ou balai… On le voit en ce moment-même, les petites filles sont destinées à jouer à la « maman » et ainsi, on les conforte dans leur futur boulot : cheffe de projet de famille.

Et si aujourd’hui, beaucoup d’hommes souhaitent s’investir dans le quotidien, ils n’ont pas été câblés pour être en charge. Ils ont encore besoin d’aide pour prendre les devants et ne plus avoir à demander ce qu’il faut faire. C’est donc à la nouvelle génération de bénéficier de nos constatations. Eduquons les petits garçons et les petites filles différemment pour que la charge mentale soit divisée par deux.

Mais en attendant le jour béni où la société ne verra plus les femmes comme des « to do list » vivantes, on fait comment pour baisser la charge mentale ?

Les bons conseils de mémé Suzette

Alors concrètement : il s’est passé quoi depuis la « révélation » d’Emma et les milliers d’articles qui ont suivi sur la charge mentale ?

En septembre 2017, la dessinatrice postait une nouvelle BD intitulée « La fautes des femmes ». Elle qui avait l’espoir fou d’une révolution féministe se casse durement les dents (et les nôtres aussi) sur le traitement du sujet dans les magazines. Tout ce qu’elle voit, tout ce qu’elle lit, ce sont des conseils aussi stupides qu’inutiles comme « prendre du temps pour soi », « accepter d’en perdre », « lâcher prise » et une petite pépite : « en cas de panique… FREDONNER. » Mais oui, et les licornes font cacas des arc-en-ciel.

La jeune femme cherche désespérément des articles traitant des hommes et de ce qu’ils peuvent faire pour décharger leur compagne de leur seconde journée. Rien. Ou presque. On note tout de même le magnifique article de Daron qui encourage les papas à prendre leurs responsabilités.

Mais le constat est amer pour Emma. Le terme « charge mentale » est surtout utilisé pour générer du clic sur les réseaux, ce qu’on appelle dans le jargon « un putaclic » ou un « clickbait ».

Il va donc bien falloir attendre – patiemment – que la nouvelle génération, celle éduquée par des femmes et des hommes conscients de l’injustice sociale autour de la charge mentale, prenne le pouvoir et écrive un autre futur pour le sexe « faible ».

Force du tremblement de terre « charge mentale » : 3 sur l’échelle de Richter.

 


To do list d’une femme ordinaire 

√ Préparer les affaires de Kevin

√ Réduire le tas de linge à 3kilos

√ Repasser les chemises de Dawa

√ Rendre le dossier UV7845 pour hier

√ Ne pas tuer Michel de la compta

√ Préparer un gâteau pour la fête de l’école de Brenda à 22 h


 

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